Stratégie carbone zéro : pourquoi le Scope 3 est le dernier frein à lever pour le secteur immobilier ?

L’immobilier est en pleine transition vers des pratiques plus durables. Alors que les efforts ont longtemps porté sur la réduction des consommations énergétiques des bâtiments (Scope 1 et 2), un enjeu de taille reste encore sous-estimé : le Scope 3, qui représente jusqu’à 90 % de l’empreinte carbone d’un gestionnaire d’actifs.

Les émissions du Scope 3 incluent les matériaux de construction, les travaux de rénovation, la gestion des déchets et la fin de vie des bâtiments. Tant qu’elles ne seront pas intégrées dans les stratégies ESG, l’objectif de neutralité carbone restera hors d’atteinte pour le secteur immobilier.

Pourquoi le Scope 3 est-il encore le grand oublié de la transition bas-carbone ? Comment lever ce frein pour rendre l’immobilier réellement aligné avec les exigences climatiques ?

1. Pourquoi le Scope 3 est-il sous-estimé dans l’immobilier ?

Un secteur historiquement centré sur la performance énergétique

Pendant des décennies, la réduction des émissions de CO₂ dans l’immobilier s’est concentrée sur l’efficacité énergétique des bâtiments :

  • Amélioration de l’isolation thermique pour limiter les consommations de chauffage et de climatisation.
  • Optimisation des systèmes énergétiques avec des équipements plus performants.
  • Recours aux énergies renouvelables pour limiter les émissions directes (Scope 1) et celles liées à l’électricité (Scope 2).

Ces actions ont permis de réduire significativement l’impact des bâtiments en exploitation, mais elles ne prennent en compte qu’une fraction des émissions totales.

Un poids carbone invisible dans la construction et la rénovation

Le Scope 3 couvre toutes les émissions indirectes associées à un bâtiment :

  • Le carbone incorporé dans les matériaux (béton, acier, bois, verre…).
  • Les émissions liées aux travaux de rénovation et d’entretien.
  • Les déchets de construction et leur impact environnemental.
  • Le transport des matériaux et des déchets.

Ce sont ces éléments qui pèsent le plus lourd dans le bilan carbone d’un actif immobilier. Un bâtiment neuf ultra-performant sur le plan énergétique peut mettre plusieurs décennies à compenser son empreinte carbone de construction.

Un manque d’outils pour quantifier et réduire ces émissions

Jusqu’à récemment, les outils de mesure et de suivi du carbone incorporé étaient peu développés. Contrairement à la consommation énergétique, qui peut être facilement mesurée et suivie, le Scope 3 nécessite des analyses plus complexes, notamment des analyses du cycle de vie (LCA).

Sans données précises, il est difficile pour les gestionnaires d’actifs d’intégrer ces émissions dans leurs décisions d’investissement et de rénovation.

2. Pourquoi le Scope 3 devient incontournable pour atteindre la neutralité carbone ?

Des réglementations qui intègrent progressivement le carbone embarqué

Les réglementations évoluent rapidement pour inclure l’impact carbone global des bâtiments :

  • La RE2020 en France impose une limitation des émissions du cycle de vie des bâtiments neufs.
  • La taxonomie européenne exige une évaluation du carbone incorporé pour l’éligibilité aux financements verts.
  • Les labels BBCA, HQE et BREEAM prennent en compte le Scope 3 dans leurs critères de certification.

À terme, il est probable que la prise en compte du carbone incorporé devienne aussi contraignante que la performance énergétique, rendant certains actifs non conformes et difficilement valorisables.

Des investisseurs de plus en plus exigeants sur l’empreinte carbone globale

Les financeurs et fonds d’investissement ESG intègrent désormais la gestion du Scope 3 dans leurs critères d’investissement.

  • Les obligations vertes (« green bonds ») et les financements durables privilégient les projets avec une trajectoire bas-carbone claire.
  • Les banques exigent une meilleure transparence sur les émissions de l’ensemble du cycle de vie des actifs.
  • Les investisseurs appliquent des décotes (« brown discount ») aux bâtiments avec un fort impact carbone embarqué.

Un bâtiment mal optimisé sur le Scope 3 risque donc de perdre en valeur et d’être exclu des portefeuilles des investisseurs les plus engagés.

3. Comment lever le frein du Scope 3 pour structurer une trajectoire carbone zéro ?

Cartographier et mesurer l’empreinte carbone du portefeuille immobilier

L’intégration du Scope 3 dans une stratégie carbone zéro commence par une analyse précise des émissions :

Identification des matériaux et de leur empreinte carbone grâce aux bases de données de matériaux bas-carbone.

Cartographie des gisements de matériaux réemployables pour maximiser l’économie circulaire.

Intégration des cycles de rénovation et d’entretien pour anticiper l’impact carbone des futurs travaux.

Sans ces données, aucune trajectoire bas-carbone ne peut être crédible ni mesurable.

Intégrer des stratégies de réemploi et de matériaux bas-carbone

Réduire l’impact carbone du Scope 3 passe par :

  • Le réemploi des matériaux existants plutôt que l’achat de nouveaux produits.
  • L’utilisation de matériaux biosourcés ou recyclés (bois, béton bas-carbone, isolants naturels).
  • L’optimisation des processus de construction et de rénovation pour limiter les pertes et la consommation de ressources.

Ces stratégies permettent de réduire jusqu’à 40 % l’empreinte carbone d’un projet immobilier【2】.

Optimiser les décisions d’investissement et de rénovation grâce à la modélisation

Grâce aux outils de digitalisation du patrimoine, il est possible de :

Simuler différents scénarios de rénovation et mesurer leur impact carbone.

Comparer les bénéfices environnementaux et financiers du réemploi par rapport aux matériaux neufs.

Aligner les actifs avec les exigences des financeurs et investisseurs ESG.

Cette approche permet de structurer une trajectoire bas-carbone crédible et d’anticiper les évolutions réglementaires et financières.

4. Vers une intégration systématique du Scope 3 dans l’immobilier ?

Un nouveau standard pour la gestion des actifs

Les gestionnaires qui adoptent une approche intégrant le Scope 3 dès aujourd’hui bénéficieront d’un avantage concurrentiel majeur :

  • Un accès facilité aux financements verts et aux subventions pour la transition écologique.
  • Une meilleure anticipation des obligations réglementaires et des seuils d’émission imposés.
  • Une valorisation optimisée des actifs, en limitant le risque de dévalorisation lié aux nouvelles normes ESG.

Un levier clé pour la compétitivité des acteurs immobiliers

L’optimisation du Scope 3 devient un critère déterminant pour les acteurs du marché immobilier :

  • Les investisseurs exigent une transparence accrue sur les émissions du cycle de vie des bâtiments.
  • Les locataires et utilisateurs recherchent des bâtiments réellement bas-carbone, et pas seulement performants sur le plan énergétique.
  • Les labels et certifications environnementales intègrent de plus en plus l’impact carbone des matériaux et des travaux.

Conclusion : intégrer le Scope 3, la dernière étape vers un immobilier réellement bas-carbone

Si le secteur immobilier veut atteindre une véritable neutralité carbone, il doit aller au-delà des seules performances énergétiques et intégrer le carbone embarqué des bâtiments dans ses stratégies ESG.

Les gestionnaires d’actifs qui adoptent cette approche bénéficient de :

Un accès prioritaire aux financements et investissements verts.

Une meilleure maîtrise des coûts de mise en conformité.

Une valorisation renforcée de leurs actifs sur le long terme.

Le Scope 3 n’est plus une contrainte, mais un levier stratégique incontournable pour garantir la résilience et la compétitivité de l’immobilier bas-carbone.

En savoir plus

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Sources :

[1] Global Status Report for Buildings and Construction 2021 (UNEP) – Lien

[2] European Environment Agency (EEA) – Lien

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